Intervention censurée devant le Conseil Municipal du 2 octobre 2018

Après la démocratie participative, Valence affirme la « démocratie sélective« . Le principe ? Trier les citoyens sur le volet en fonction de leur avis. Vous émettez un point de vue différent de celui du Maire ? Vous n’avez pas le droit de cité.

Pour preuve, le refus au dernier moment de permettre à un représentant de Bancs Publics d’intervenir lors du dernier Conseil Municipal afin de donner voix à une mobilisation citoyenne remettant en question le parking Q-Park Place Manouchian…

Voici le texte que nous avions prévu pour l’occasion :

Monsieur Le Maire, Mesdames et Messieurs les élus du Conseil Municipal,

Nous aurions aimé pouvoir vous remercier de nous permettre de nous exprimer dans le cadre de cette instance démocratique. Nous avions demandé à prendre la parole publiquement car il nous semble capital de vous faire connaître la mobilisation citoyenne qui a vu le jour avec l’annonce de la création d’un parking privé et payant en lieu et place de la Place Manouchian en plein centre-ville de Valence…

Plusieurs élus ici présents connaissent déjà l’association Bancs Publics qui réunit près de 200 adhérents. Beaucoup ignorent peut-être  les démarches nombreuses menées ces derniers mois et les motivations qui animent le rejet massif du projet d’aménagement de la Place Manouchian. Ce projet ignore en tous points les préconisations pour un développement harmonieux de nos villes. Ce projet ne peut faire face aux enjeux du 21e siècle qui nous enjoignent à penser, concevoir et se mouvoir dans la Ville différemment – et donc à limiter la place de la voiture.

Notre position n’est d’ailleurs pas marginale, bien au contraire, de nombreuses personnalités, experts et responsables politiques affirment clairement que l’on ne peut/que l’on ne doit plus faire la Ville comme cela a été le cas au siècle passé, avec une place prédominante donnée à la voiture au détriment de la Ville elle-même et de ses habitants.

Valence fait partie des villes où la qualité de l’air est mauvaise, voire très mauvaise. Vous n’êtes pas sans le savoir, et la réduction de la vitesse sur l’autoroute ne suffira pas à endiguer ce phénomène, nous en sommes tous bien conscients.. D’autres mesures, en cohérence avec l’objectif d’améliorer la qualité de l’air à Valence, sont indispensables.

Le réaménagement de la Place Manouchian – appelée de vos vœux et de notre part également, puisque nous ne doutons pas de son état de vétusté  – offre une superbe occasion de décliner ici et maintenant les principes d’un développement durable et harmonieux.

Le projet de parking Q-Park voté sans aucune concertation en décembre dernier par le Conseil Municipal de Valence est-il de nature à répondre aux enjeux d’une Ville durable et redynamisée ?

Non seulement nous nous permettons d’en douter mais nous nous érigeons, nombreux, contre un projet qui va totalement à contre-courant de ces objectifs nobles que nous défendons.

Je vous rassure, nous ne sommes en rien réfractaires à un usage raisonné de la voiture, et nous vous appelons à un sursaut de conscience pour la santé des habitants, pour l’image de Valence et de son centre-ville : La place Manouchian mérite bien mieux qu’un parking à ciel ouvert :

  • 1er argument : L’évaluation de la DSP de Q-PARK par la Ville  dont les résultats ont été rendus publics en septembre 2017 montre, chiffres à l’appui, que le taux de remplissage des parkings existants est faible (inférieur  à 30% en moyenne,  de 40,8% pour le parking de l’Hôtel de Ville). La disponibilité moyenne sur la journée est évaluée à 1900 places sur l’ensemble des parkings payants et à 1400 places à 15h00, horaire de plus forte affluence selon les statistiques de QPARK. Il n’y a donc clairement  pas de besoin de créer des places de parking payantes supplémentaires. Sans compter qu’il existe plus de 1000 places non payantes à moins de 5 à 10 minutes à pied de l’hyper centre.
  • 2e argument : les habitants du centre-ville sont majoritairement en faveur d’un réaménagement qualitatif de la Place : avec un parc, donc plus d’espaces verts, des jeux pour enfants, du beau mobilier urbain, de l’ombre… Pour continuer à faire un usage citoyen de l’espace public, synonyme de lien social, de convivialité, de mixité, ce que permet un parc public en somme et empêche un parking privé.
  • 3ème argument : La répétition et l’accentuation des épisodes caniculaires comme ceux de cet été renforcent notre conviction que la vie en centre-ville deviendra insoutenable si l’aménagement urbain ne s’accompagne pas de végétalisation de l’espace public. La bétonnisation et le goudronnage des espaces publics tels que le projet de parking de la place Manouchian représentent une menace pour la qualité de vie des résidents comme des non résidents.
  • 4ème argument : ce projet de parking n’est pas compatible avec le programme « Cœur de Ville » pour lequel Valence a été sélectionnée. Comment croire sérieusement qu’un parking privé et payant à ciel ouvert (alors même, rappelons-le utilement, que le parking souterrain existant a un taux de vacance moyen de <60%) pourra attirer plus de personnes en ville… ? Au contraire, un nouveau parking nuira à l’image du centre piéton, alors qu’un véritable parc, îlot de verdure et de fraîcheur attirerait familles, personnes âgées et de nombreux citoyens pour profiter pleinement d’un espace vert public de qualité.

C’est là la revendication principale de l’association Bancs Publics qui a déposé un recours contre le permis d’aménager qui scelle un destin funeste pour cette place : c’est un parc public que nous voulons et non un parking privé !

Malheureusement les travaux ont malgré tout commencé la semaine dernière, la Place Manouchian ressemble à un champ de bataille et Bancs Publics a immédiatement déposé un référé en suspension… L’audience aura lieu le 10 octobre prochain devant le Tribunal Administratif de Grenoble.

Il appartient aux citoyens, aux élus de donner corps au concept de Ville Durable : saisissez-vous du réaménagement de la Place Manouchian pour faire prévaloir l’intérêt général et enterrez ce projet de parking déjà obsolète avant même d’exister…

  • Je finirais avec une citation d’Olivier Razemon, auteur de l’ouvrage à succès « Comment la France a tué ses centres-villes : « pour qu’une ville soit vivante, il faut d’abord y laisser circuler les piétons, car sans espace de vie, ce n’est plus une ville mais un garage à voitures à ciel ouvert ».

A défaut de vous remercier de votre écoute, nous vous remercions de votre lecture.